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Qui sont les militants Génération Z ?

Dernière mise à jour : 13 juin 2022

L'enquête avait pour but de répondre à la question suivante : qui sont les militants GZ ? D'où viennent-ils ? Comment raisonnent-ils ? En bref, le but était de réfléchir sur le profil de ces militants, comprendre pourquoi ils supportent des idées aussi radicales, passéistes voire réactionnaires.


Au fil du temps passé avec eux, j'ai pu distinguer plusieurs profils de militants et plusieurs causes de leurs idées. Il se dégage deux grands facteurs communs aux personnes qui adhèrent aux idées d'Eric Zemmour : leur milieu social (famille, religion, lieux de vie, profession) et leurs canaux d'information (médias, discussions, réseaux sociaux, etc.).


Par ces facteurs, plusieurs profils se distinguent chez les militants GZ mais je ne n'irai pas jusqu'à distinguer un profil-type unique.


Un milieu social majoritairement aisé


Les militants que j'ai pu rencontrer proviennent de différents milieux sociaux, même si un prédomine. Beaucoup d'entre eux viennent d'un milieu qu'on peut appeler "catholique conservateur" avec des valeurs chrétiennes fortes provenant de leur milieu familial. Ce profil de militant subit une forte reproduction sociale couplée à une adhésion totale à l'idée d'une identité française basée sur la religion catholique. Cela est observable par leur opposition au mariage pour tous, par exemple. (cf Discriminations chez Génération Z : entre racisme, xénophobe, sexisme et homophobie.).

À cela s'ajoute des positions négatives par rapport à l'avortement, chez les hommes comme chez les femmes. L'avortement y est vu comme un crime par certains, prouvé par cette discussion avec un militant contre l'avortement me demandant "pourquoi rajouter un crime sur un crime?" alors que je lui pose la question de l'avortement sur les grossesses issues de viol.

La famille, la religion et la tradition sont les points cardinaux de leur schéma de pensée. La plupart de ces militants catholiques conservateurs font le carême et passent des dimanches en famille à l'église. Il ressort donc de cet habitus religieux et familial des valeurs conservatrices, traditionnelles voire réactionnaires, valeurs que l'on retrouve dans de nombreux discours d'Éric Zemmour.


Leurs professions, le type d'écoles et lycées fréquentés est aussi indicatif de leur profil. À l'image des idées libérales portées par leur candidat, la plupart souhaite travailler dans la finance ou le commerce. Ils fréquentent des écoles privées parisiennes, des lycées privés ou réputés voire des universités catholiques. Parmi eux, certains s'intéressent au droit, mais le plus souvent orienté dans le secteur du droit des affaires. On retrouve souvent des discours néolibéraux, faisant l'apologie de la privatisation, de la méritocratie, rejetant "l'assistanat".


L'autre grand milieu d'étude et de profession se trouve dans l'apprentissage de l'Histoire et de la politique. Des passionnés de l'histoire de France qui en ont une vision glorieuse et ethnocentrée très proche de celle de leur candidat. Des visions de l'Algérie française en passant par Napoléon et De Gaulle, l'Histoire de France est vue comme lumineuse, plus glorieuse dans ses conquêtes que dans l'esprit des Lumières.


Le culte de la force de l'homme, du charisme du grand dirigeant, du sauveur du pays est commun à ces deux milieux étudiants et profils militants. Dans le premier, ce culte s'incarne plutôt dans leur propre virilité, force et dans le second, dans celui du dirigeant charismatique qui les guideraient.

Cette dimension là permet d'expliquer leur attache à Éric Zemmour et leur critique pour le personnage de Marine le Pen. Eric Zemmour est vu justement comme un homme incarnant des convictions fortes, comme un futur dirigeant épris et défendant de grandes valeurs et non pas comme un politicien calculateur se contentant de sa position dans un parti. Les "frissons" plusieurs fois exprimés lors des meetings par les militants montrent à quel point ses convictions touchent et galvanisent les militants de GZ. A contrario, Marine le Pen est vue comme une politicienne, héritière d'un parti déjà implanté, capable de "vendre ses ambitions" pour élargir son électorat.


Le sauveur de la France face à la politicienne "modérée", leur choix est fait.

On distingue clairement une majorité de militants vivant dans des quartiers "aisés" parisiens ou de banlieue. Pour ceux habitants en région initialement, leurs appartements étudiants se situent surtout dans des arrondissements les plus riches de Paris. Ce qui explique le grand nombre de militants et leur fort investissement dans les 17e, 8e et 16e arrondissement, où Eric Zemmour est arrivé second à l'élection présidentielle selon la carte des résultats de la présidentielle du Monde. Tandis que dans les arrondissement splus "à gauche" comme le 5e, 11e, 19e et 20e la présence est plus modéré. Une observation à relativiser par l'investissement de certains membres dans plusieurs arrondissements.


En revanche certains arrondissements, notamment le 14e et le 13e, font preuve d'un grand investissement de la part des militants malgré des résultats prouvant une forte proportion de vote pour Emmanuel Macron et Jean Luc Mélenchon. Un constatation qui pourrait notamment s'expliquer par l'emplacement de l'Institut Catholique de Paris dans le 6e arrondissement et proche du 14e qui rassemble en son sein une bonne partie des militants rencontrés. Obligeant ceux provenant de région d'habiter dans ces arrondissements.



Des sources d'informations confortant leurs idées


En lien avec ce premier facteur, les canaux d'information des militants GZ sont évidemment une cause de leurs opinions. Dans ces réseaux là, on inclut les discussions familiales mais surtout les médias.

Tout d'abord, la reproduction sociale implique aussi que les militants GZ se renseignent auprès, évidement, de leur famille mais surtout avec les médias et canaux d'informations communs à leur famille. Ainsi, certains militent pour Eric Zemmour parce qu'ils le suivent depuis longtemps sur CNEWS. Les journaux tels que Valeurs Actuelles sont aussi très relayés et suivis parmi les militants. Il est important de préciser que ces réseaux et médias restent des points de vue politiques, sociaux ou économiques légitimes et que le principal danger que je veux pointer est l'exclusivité de ces réseaux dans la consommation d'information des militants GZ. En effet, les journaux et médias marqués "à droite" voir "extrême-droite" sont, pour les militants de GZ, des sources sûres, fiables et honnêtes parlant des "vrais problèmes de la France". Tandis que les médias traditionnels ou marqués "à gauche" font l'objet de vives critiques quant à leur indépendance et leur orientation politique. La preuve en est par exemple de la défiance envers l'émission télévisée "Quotidien" qui fut l'objet d'attaques durant les meetings d'Eric Zemmour.

Le militant va donc à la fois avoir cette confiance aveugle dans certains médias, qui confirment ses opinions et les nourrissent, et à la fois cette méfiance déraisonnée envers les médias diffusant des positions opposées à ses convictions. Un mélange entre une défiance parfois proche du complotisme et une confiance aveugle en leurs canaux d'information.


Ce phénomène se voit aussi très fortement à travers l'intérêt apporté aux sondages. Vers la fin de la campagne présidentielle et la baisse d'Eric Zemmour dans les sondages, de l'IFOP notamment, la critique de ces derniers est véhémente chez les membres de Reconquête et GZ au point de porter un discours commun sur la non-fiabilité de n'importe quel sondage.

"Les sondages ont souvent tort, le vote caché va tout faire". Le vote caché étant la partie des électeurs votant pour un candidat sans oser le dire aux sondeurs. Avec pour preuve de ce vote caché "les meetings pleins en 3 jours", "le nombre de vente des livres d'Eric Zemmour", "le nombre incroyable de militant GZ et Reconquête". Mais de l'autre côté, les sondages mettant Éric Zemmour sur le podium de l'élection présidentielle sont portés en triomphe, en vérité absolue de la victoire de leur candidat. Et cette contradiction se retrouve jusque dans les discours des cadres du parti, et même des directeurs de campagne. Quelques jours avant le vote du premier tour, Éric Zemmour en personne nous envoie un message vocal sur les groupes Telegram GZ, annonçant qu'il détenait "les vrais sondages" (ceux de l'application Qotmii) le donnant au second tour face à Emmanuel Macron tout en conseillant à ses militants de ne pas croire en ce que les médias leur racontent et en rappelant qu'il est le seul "vote utile" à droite. Ce message reflète exactement la dynamique de bulle médiatique consistant à croire et écouter les canaux d'informations uniquement en faveur de ses opinions et de rejeter fermement tout autres points de vue ou faits allant à l'inverse de ces dernières, notamment en les accusant de mensonge ou de complaisance avec les autres partis politiques.


Cette bulle médiatique a des conséquences similaires avec la reproduction sociale des idées politiques. Dans les deux cas, l'opinion adverse, contraire est vu comme illégitime, malhonnête ou n'est tout simplement pas écoutée car, par définition, fausse.

J'ai pu l'observer notamment chez des militants avec qui j'ai confronté leurs idées implantées depuis longtemps par le schéma familial avec les miennes. En quelques simples phrases, le propos qui m'est tenu perd de son sens et de sa vérité auprès de la personne qui me l'a avancé. Lors d'une discussion avec une militante sur le voile, cette dernière me demande ce que je pense des femmes voilées. Je réponds qu'après certaines discussions avec les personnes concernées, ces dernières m'expliquaient qu'elles le portaient par choix et que ce n'était pas, selon elles, un symbole de "soumission de la femme", comme l'avance les discours d'Eric Zemmour, mais un choix et une volonté de respecter leur religion. Ce à quoi la réponse de la militante a été l'aveu de ne pas avoir eu ces discussions, cette expérience auprès de ces femmes là. Que son avis n'était donc plus tranché sur la question après ce que je venais de lui expliquer.

J'observe clairement que la position prise sur ces sujets ne se basent pas sur un avis critique, complet, mais, pour le coup ici, sur la répétition de ce qui avait été dit dans le cercle familial. Et dans certains cas par les canaux d'information.



Pour conclure


Ce que j'ai pu constater chez les militants GZ c'est l'influence directe du milieu familial, des canaux d'information et de la connexion entre ces facteurs sur les schémas de pensés et la construction des opinions. Il n'y pas une essence malveillante chez eux, pas une "méchanceté" objective qui vit en eux, mais une éducation spécifique et le développement d'une réflexion malhonnête intellectuellement.


L'articulation entre des valeurs socialement imposées (famille, religion, lieux de vie) et ce phénomène de défiance intellectuelle amenant à l'enfermement médiatique renforce les opinions des militants de GZ, ce qui empêche in fine la construction d'un débat intelligible et la réconciliation des idées.




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